Expérimentation du RSA sous condition d’activité

Publié le 4 avril 2024


Pourquoi faut-il craindre une nouvelle hausse dans les mois à venir ? La croissance économique n’est pas au rendez-vous. Le gouvernement vient de revoir ses prévisions de croissance à la baisse pour 2024 (de 1,4% prévus à l’origine à 1%). Les économistes sont encore moins optimistes et tablent sur 0,7%. L’objectif du plein emploi est loin d’être atteint.

La suppression de l’Allocation Spécifique de Solidarité aura un impact sur le RSA.

Cette suppression de l’ASS pour les personnes privées d’emploi en fin de droits va faire basculer les plus précaires vers le RSA. Pour le Département du Pas-de-Calais c’est 6 500 allocataires RSA en plus et un coût supplémentaire de près de 45 millions €.

L’assurance chômage sera encore réformée.

Le 2 avril dernier, le 1er ministre, Gabriel ATTAL, a annoncé devant l’Assemblée Nationale une nouvelle réforme de l’assurance chômage alors que la précédente est à peine mise en œuvre et n’est pas évaluée. En voulant réduire la durée d’indemnisation la conséquence sera là aussi le basculement de demandeurs d’emploi en fin de droit vers le RSA.

Paupériser les plus fragiles pour faire baisser les chiffres du chômage et transférer les dépenses vers les Départements ne peut pas être une méthode !






Rappel de la prise en charge du RSA avant l’expérimentation

Les allocataires du RSA font ils actuellement l’objet d’un accompagnement de la part du Département ?

Oui, le Département a mis depuis l’origine un accompagnement adapté aux problématiques de la personne. Actuellement, 85% des bénéficiaires sont accompagnés ; les 15% restants sont des situations particulières (personnes n’ayant plus l’obligation d’être accompagnées au sens de la loi, en cours de sortie du RSA, en cours d’orientation et personnes où on a arrêté l’accompagnement pour raison de santé).



La Mission Insertion Emploi du Pas-de-Calais existe depuis 2009. Cette opération mobilise des crédits européens à savoir le Fonds Social Européen FSE+ et le Fonds de Transition Juste FJT. Le Service Public pour l’Insertion et l’Emploi a été lancé en 2021 dans le Pas-de-Calais, dans ce consortium on retrouve l’Etat, le Conseil Régional des Hauts-de-France, France Travail, l’ARS, la CAF, la MSA et les autres acteurs de l’emploi (Cap emploi, missions locales…), de la formation, du logement, de la santé, de la mobilité, associations et entreprises. 


L’objectif de cet accompagnement est-il le retour à l’emploi ? 

Toujours !

Suite à un diagnostic personnalisé et à l’aide de mesures d’accompagnement individualisé du Département et de ses partenaires, l’objectif est de réussir à lever tous les freins qui empêchent l’emploi (problèmes administratifs, de mobilité, médicaux, logement, garde d’enfant, de santé, perte de repères…). 


Le Département est-il le seul à faire cet accompagnement ?

Le Département s’appuie sur de nombreux acteurs pour mettre en place l’accompagnement des allocataires : CCAS, structures associatives (mission locale, association d’insertion, PLIE) et France Travail. Cet accompagnement est piloté par la Direction des Politiques d’Inclusion Durable du Département et il est mis en œuvre dans les territoires au sein des Maisons du Département Solidarité à l’aide du SLAI.

Le Service Local Allocation Insertion assure ainsi l’orientation des bénéficiaires du RSA vers les référents et les dispositifs correspondants aux besoins du public et impulse la dynamique partenariale dans le champ de l’insertion sociale et professionnelle.


Cet accompagnement est-il une obligation pour les bénéficiaires du RSA ? 

Oui, un allocataire est soumis aux droits et devoirs (obligation d’être accompagné et définir un parcours d’insertion) dès lors qu’il est au RSA et ne perçoit pas de revenu d’activité ou moins de 500€ de revenu d’activité.




La prise en charge du RSA avec l’expérimentation

Le gouvernement a souhaité faire évoluer le dispositif RSA et expérimenter de nouvelles méthodes avec pour 1ère mesure la création de France Travail ; Est-ce une évolution positive ? 


Concernant la création de France Travail à la place de Pôle Emploi

France Services, France Ruralités, France Stratégie… France Travail… Un changement de nom n’est pas la garantie de plus d’efficacité, surtout quand les moyens ne suivent pas. 

En revanche, la mise en place d’un réseau d’acteurs qui vont concourir à la mise à l’emploi des personnes est évidemment positif. C’est d’ailleurs ce qui est déjà mis en œuvre dans le Pas-de-Calais.

Cela doit se traduire par une meilleure coordination et complémentarité entre les institutions/acteurs qui interviennent dans l’emploi. Par la mutualisation des offres de service de droit commun on peut espérer des synergies et un meilleur accès à l’emploi.


Concernant la prise en charge du RSA 

Ce changement peut la rendre plus efficace si :

– Le partage d’informations entre les différents opérateurs est réel.

– La mise en place d’un outil unique permet de simplifier le suivi des allocataires par les différents partenaires (ex : un contrat d’engagement dynamique pour les publics demandeurs d’emploi, jeunes bénéficiaires…).



Quels sont les 1ers résultats de la 1ère phase de cette expérimentation ? 

En 2022, le Département du Pas-de-Calais a refusé d’entrer dans cette 1ère phase de l’expérimentation car les contours étaient trop imprécis et le risque d’avoir des personnes sans droits ni ressources était réel. Finalement, peu de Départements ont participé et le retour d’expériences n’est pas suffisant pour éclairer la situation.

Quasiment aucun Département ne s’est engagé dans la mise en œuvre des 15-20h. l’accent a davantage été mis sur le volet organisationnel, la définition du qui fait quoi et la prise en charge du public.  L’Ille-et-Vilaine par exemple s’attache à l’écriture de la définition du besoin sur le territoire de Redon pour 1400 allocataires. La Loire-Atlantique a procédé à un renfort de palettes d’activités avec des actions santé-psycho, de reprise de confiance en soi avec des difficultés de mobilisation publics sur les dispositifs sur une partie de Saint Nazaire pour 1400 allocataires.  Au final, on constate surtout une mise à niveau dans les Départements qui n’avaient pas encore de service insertion.



Pourquoi le Département a-t-il accepté d’entrer dans la 2ème phase de l’expérimentation ? 

Comme le prévoit la loi de plein emploi adoptée en 2023, le nouveau dispositif sera généralisé le 1er janvier 2025. Alors mieux vaut avoir du temps devant nous pour tester, participer aux constructions en cours et faire état des dysfonctionnements plutôt que de subir dans un an.

Par ailleurs, les incertitudes, notamment sur les 15-20h à effectuer par les bénéficiaires, ont été levées. Enfin, nous serons accompagnés financièrement par l’Etat pour se préparer à cette mise en œuvre. Devant les difficultés budgétaires rencontrées par les Départements nous agissons en responsabilité.



Le Pas-de-Calais est-il le seul département de gauche à être rentré dans l’expérimentation ? 

3 collectivités de Gauche sont rentrées dans la première expérimentation : Métropole de Lyon, Loire Atlantique, Ille-et-Vilaine. Le Département de la Seine-Saint-Denis s’est retiré avant le démarrage de la première expérimentation, en mars 2023. Sur les 29 autres Départements de la seconde vague, le Pas-de-Calais et le Finistère sont de gauche.




La mesure phare de cette réforme c’est la création d’une contrepartie de 15h à 20h à effectuer pour le BRSA.

Cela veut-il dire 15h de travail « bénévole » au sein des communes, des associations ou des entreprises ? Concrètement à quoi vont servir ces 15h-20h d’engagement dans le Pas-de-Calais ? 


Dans la loi, il n’est pas question d’une obligation de 15-20h de bénévolat à effectuer ni de travail gratuit ; Tous les doutes ont été levés. Par ailleurs, aucune commune, association ou entreprise ne sera sollicité pour cela. Il faudrait d’ailleurs créer toute une organisation d’accueil et d’encadrement qui coûterait bien chère au regard des résultats. Il faut toujours se méfier des « fausses bonnes idées » !

Ces 15-20h serviront à renforcer et à valoriser les actions d’accompagnement pour lever les freins à l’emploi : les actions en faveur de la mobilité, de la remobilisation des allocataires, autour de la santé, les ateliers de sensibilisation et de découvertes des métiers, les nombreux forums de l’emploi, l’insertion par l’activité économique, les chantiers d’insertion…

Le Pas-de-Calais possède une grande expertise en la matière ; C’est d’ailleurs ce qui a permis, en 2022, de remettre à l’emploi 9 350 allocataires du RSA et jeunes de moins de 26 ans sans qualification.



Quand aura lieu le début de l’expérimentation dans le Pas-de-Calais ?

La réforme France Travail s’applique au 1er janvier 2025 pour les nouveaux entrants au RSA et les institutions ont jusque 2027 pour intégrer les allocataires antérieurement au RSA.

L’expérimentation débutera au 1er juin 2024 dans le Pas-de-Calais et ne concernera que les nouveaux entrants et par exception quelques allocataires déjà accompagnés.



Quels territoires participeront à cette expérimentation en 2024 ? 

L’expérimentation se déroulera dans 3 territoires : le montreuillois, l’audomarois et le lensois. Nous avons fait le choix de trois territoires différents (rural, urbain, périurbain). 



Puisque le chômage baisse et que des emplois sont disponibles, n’est –il pas plus simple de supprimer le RSA ? 

Considérer qu’il suffit de traverser la rue pour trouver un emploi est certes une formule efficace en terme de communication mais la réalité est moins simple. Toute personne n’est pas employable immédiatement, cumulant plusieurs freins (problème de formation, d’adaptabilité à un poste, de mobilité, de garde d’enfants…). Des freins plus ou moins importants sur lesquels peuvent travailler les agents du Département et nos partenaires.

Le RSA est alors ce qui permet de ne pas sombrer et de reprendre pied dans la vie professionnelle. Mais cela réclame du temps et de l’accompagnement. 

Pour d’autres, qui représentent une minorité, ce sont des problématiques plus spécifiques liées à la santé, à la santé mentale parfois, qui entravent très fortement l’accès à l’emploi. Le RSA est alors le dernier filet de sécurité.

Il est parfois utile de rappeler l’origine de la mise en place du Revenu Minimum d’Insertion (R.M.I.), par le gouvernement socialiste de Michel ROCARD, en 1988, qui instaure le principe d’universalité de l’aide sociale plutôt que des minima sociaux par catégorie. C’était une réponse au développement d’une «nouvelle pauvreté» qui ne touche plus prioritairement les personnes âgées mais celles en âge de travailler.

Avec la transformation du dispositif en RSA, l’accompagnement social devient alors un outil visant à lever les freins au retour à l’emploi, ce qui est une avancée pour favoriser le retour au marché du travail.

Le RSA doit donc rester un outil de solidarité et d’insertion professionnelle mais sûrement pas d’exclusion !




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